Essai Triumph Rocket III

Essai Triumph Rocket III

Par Jean-Michel Lainé le .

Deux versions d'une machine inclassable comme jamais l'industrie deux roues n'avait osé en produire en série...

La Triumph de tous les superlatifs fait couler beaucoup d'encre et nombreux sont ceux qui se demandent dans quelle catégorie doit-elle être rangée ? Mais est-ce vraiment la question ? Sur le papier, elle est superlative par ses dimensions, son moteur de 2300cc pour seulement 3 cylindres ou encore la taille des pneus mais une fois en selle, cette machine qui fait tourner tous les regards, donne une toute autre image d'elle-même.

Pour réaliser cet essai, nous voilà au guidon non pas d'une mais de deux machines inclassables, des machines comme jamais l'industrie deux roues n'avait osé en produire en série. Les deux sont bien des Rocket III : La première reçoit un équipement Touring avec pare-brise, tableau de bord complet, larges sacoches et phares additionnels. La seconde est la Tribal, appelée ainsi en raison de sa décoration originale.

Moteur et boîte
Le moteur est sans aucun doute la pièce maîtresse de cette machine. Avec sa cylindrée de 2300cm3, impossible de trouver plus gros sur le marché actuellement. Placé dans le sens longitudinal par rapport à la route, il fait légèrement partir la moto à droite lorsqu'on accélère et un petit peu à gauche lorsqu'on relâche mais rien de comparable à un flat ou un twin, le mouvement est perceptible sans plus.

Le moteur offre un tel couple, que Triumph a mis en place un système permettant de le limiter sur les premiers rapports. Les accélérations sont tout de même étonnantes à tel point que rouler très lentement n'est pas chose facile et demande de l'attention. La bête ne demande qu'à bondir. Le moteur s'exprime de 1500tr/min à la zone rouge située à 6500tr/min. Les reprises sont toujours présents sur tous les rapports et à tous les régimes même lorsque la vitesse est élevée - la vitesse de 130km/h est atteinte sur le dernier rapport à 3000tr/min.

Le trois cylindres ( 91db à 3000tr/min) fait preuve d'une vitalité étonnante : Il reprend d'un coup même sans ouvrir en grand mais il permet également d'atteindre des vitesses très élevées et surtout de les maintenir. Bien entendu, on s'en serait douté à la lecture de la fiche technique le couple est là, mais la Rocket III se montre joueuse avec une vivacité beaucoup plus proche d'une sportive que d'un custom, les accélérations tirent sur les bras à tous les régimes ! Quand il n'y en a plus, il y en a encore, il suffit de demander !

Les changements de rapports se font rapidement comme sur un roadster, avec un sélecteur simple branche facile à manier. Un sélecteur double branche aurait été sympa sur la version Touring pour le look. Quoi qu'il en soit, les puissantes accélérations et les changements de rapports rapides et précis permettent des variations d'allure extrêmement vives comme on le trouve sur des machines à vocation sportive.

Fourche et suspension
Là encore on est sur une machine à vocation " sportive ", la fourche inversée et l'amortisseur arrière sont là pour garantir une bonne tenue de cap même sur l'angle, durant les franches accélérations ou sur les freinages puissants. Même si la position n'a pas grand chose de sportif, on s'y fait vite et l'exploitation de la bonne santé du moteur se fait alors sans appréhension... sur le sec. Quand la route devient humide, il faut faire attention, non pas au couple qui se maîtrise avec un peu d'habitude mais à la prise d'angle. Les gros pneus (240 pour l'arrière, 150 pour l'avant) n'aiment pas tellement les chaussées humides.

L'équilibre de l'ensemble ne risque pas de gâcher son plaisir surtout que cette machine permet de prendre de l'angle. On se sent en sécurité, que cela soit en ligne droite ou dans les grandes courbes rapides, l'arrière suit l'avant sans dandiner et les freinages même très puissants se font en gardant son cap. Même si l'empattement est important, il se fait totalement oublier. Malgré un poids de 333kg, le passage d'un angle à l'autre à vitesse élevée se fait en appuyant fermement sur le guidon comme sur n'importe quel roadster. Fourche et suspension assurent la stabilité même si la Rocket III est brutalisée par une conduite sportive.

Freinage
Le freinage est tout simplement efficace. L'avant sait faire preuve de puissance pour arrêter la machine quelles que soit son allure ou la manoeuvre effectuée. Le châssis et les suspensions permettent de garder le cap sur des freinages appuyés, c'est très sécurisant et très appréciable surtout que la Rocket III incite facilement à jouer avec son étonnante maniabilité et son moteur gorgé de couple. Le freinage se devait d'être bon, et il l'est !

L'arrière, comme sur la plupart des machines qui possèdent un grand empattement, permet de bien freiner l'équipage sans pour autant le brutaliser. Le comportement est appréciable en balade tranquille surtout en duo.

Duo
L'accueil du passager est le même sur toutes les déclinaisons de la Rocket III. Sur cette machine, le passager n'est pas oublié. La selle est très confortable, les repose-pieds offrent une position agréable aux jambes, le large garde boue évite les projections et enfin, les grandes sacoches Touring dispensent de sac à dos.

On ajoute à tout ceci l'amortisseur qui fait son travail très correctement sans malmener le passager et nous voilà partis pour de longs périples " sport " ou " balade " avec le confort en plus.

Confort
En dehors de l'excellente selle et de la position, les finitions Touring et Tribal sont différentes sur le plan du confort.

Le large pare-brise de la Touring protège l'équipage des projections des intempéries mais peut donner lieu à des turbulences à haute vitesse sans toutefois gêner la conduite. La forme de ce pare-brise évacue rapidement les gouttes d'eau dès que l'on roule un peu et la perception de la route reste très bonne. La Tribal bénéficie, elle, d'un saute vent qui fait très bien son travail. Même s'il peut paraître étroit, il est long et haut, le flux d'air n'atteint pas le casque du pilote.

Pour les bagages, les grandes sacoches permettent d'emporter tout un tas de choses avec soi et de façon très simple grâce à des sacs intérieurs souples. Ces sacs intérieurs amovibles permettent d'emporter avec soi toutes ses affaires en un tour de main et de les replacer de la même façon dans les sacoches en cuir qui ne ferment pas à clé. C'est simple mais très utile au quotidien. L'essai s'étant déroulé sous la pluie pour une bonne partie, nous avons pu tester l'étanchéité de tout ceci : rien à dire, ce qui était dans les sacs intérieurs est resté au sec.

La version Touring dispose également d'équipements supplémentaires : montre à aiguille et jauge à essence au tableau de bord ainsi qu'un thermomètre digital d'huile placé directement sur le bouchon de remplissage. Les équipements au tableau de bord paraissent très près du pilote en venant se placer sur le guidon vers l'arrière, au-dessus du départ du réservoir. La jauge manque un peu à la version Tribal quand on l'a appréciée sur la version Touring. La lisibilité de ces équipements s'est montrée excellente quelles ques soient les conditions météorologiques.

Roulage
Comme la lecture des spécifications le laissait entrevoir, la machine ne risque pas de rendre indifférent au pilotage ni même au regard. Les piétons sont nombreux à venir à notre rencontre, certains automobilistes baissent leur vitre au feu pour nous poser des questions, et de nombreux motards viennent voir la machine, qu'ils roulent en sportives, en GT ou en custom. Bref, cette machine n'est pas l'idéale pour passer inaperçu, surtout en version Tribal.

Ce qui étonne le plus en s'asseyant à son guidon, c'est que la machine ne semble pas si longue qu'elle le paraît. Dès les premiers tours de roues on remarque qu'elle est douée d'une bonne agilité et comme sur un roadster, les changements d'angles se font rapidement en appuyant simplement sur le guidon.

A l'arrivée au premier virage, on note que cela passait beaucoup plus vite, la garde au sol est relativement haute et la machine s'inscrit sans broncher sans la trajectoire que l'on visait. C'est sûr au prochain virage, ça passera plus vite et ça passera effectivement très bien. En fait, on se retrouve en train de piloter un Roadster avec les pieds en avant : Ca penche et c'est vif. C'est original et demande un petit temps d'adaptation mais cela s'avère très efficace au fil des kilomètres d'autant que les freins se sont toujours montrés à la hauteur.

Le moteur étonne d'abord par sa taille. On est véritablement assis dessus ou plutôt autour vu sa largeur. A peine parti, les reprises sont fulgurantes et répondent présent à tous les régimes sans pour autant ouvrir en grand. Au ralenti, il est difficile de se maintenir à 30km/h dans une zone " 30 " sans l'aide des freins... cela tombe bien, on ne va pas visiter de vieilles villes.

La machine dévoile sa personnalité sur les belles routes de campagne et non pas sur les autoroutes rectilignes. Les reprises sont très énergiques que l'on roule vite ou non, il y a toujours de la réserve. La maniabilité et la garde au sol permettent de se faire plaisir sans appréhension dès que les virages sont là. Un petit bout droit et hop, on est catapulté à l'autre bout, un virage rapide et hop, c'est avalé, un autre de l'autre coté et hop, celui-ci aussi... En fait, que l'on souhaite rouler doucement ou de façon sportive, elle peut le faire. Elle accélère fort, freine fort et sait rester maniable et stable avec le confort en plus.

Les deux seuls bémols que nous avons trouvés sont la conduite sur sol mouillé qui demande du doigté et de la concentration et la consommation qui peut vite augmenter en conduite sportive. Concernant ce dernier point, ce n'est pas une surprise au regard de la cylindrée et des sensations délivrées.

A noter, lorsque l'on roule normalement sur différents types de route, la consommation se montre tout à fait raisonnable pour un moteur de 2300cm3 : La Touring a affiché 8.3 litres au 100km et la Tribal 9.1 litres au 100km en conduite un peu plus sportive.

Bilan essai Triumph Rocket III

Non, ne classez pas cette machine dans la catégorie des customs, elle n'y est pas à sa place. La Rocket III est un savant mélange entre un dragster homologué et un roadster sportif, une machine qui procure des sensations de roulage qu'on n'a pas retrouvées ailleurs. Il y a celles qui accélèrent fort, celles qui roulent vite, celles qui sont confortables, celles qui... La Rocket III est tout à la fois avec une touche extravagante en plus qui manque à tant de machines.

La finition Tribal nous a semblé représenter au mieux l'image que l'on a gardée de cette Triumph. Les équipements Touring sont appréciables pour le confort et les sacoches gargantuesques, mais pour nous, l'image " custom " ne lui convient pas bien.

Cette moto permet de chevaucher un dragster sportif au quotidien. Une machine unique qui ne laisse personne indifférent, piétons, motards ou automobilistes. Le look Tribal lui convient bien, reflète sa personnalité et met en valeur l'imposant moteur qu'il ne reste plus qu'à dompter d'autant que la partie cycle le permet !

Prix conseillé : à partir de 17990€ (mars 2005)

Photos essai Triumph Rocket III

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