Essai Moto-Morini Granpasso

Essai Moto-Morini Granpasso

Par Guillaume Mongin le .

À mi-chemin entre le trail-routier et le gros supermotard, la Moto Morini Granpasso 1200 est motorisée par un twin détonnant

Avec la Corsaro et la 91/2, la Granpasso 1200 marque avant tout le retour de Moto Morini sur le devant de la scène. Il faut dire que ce constructeur aujourd'hui un peu méconnu fut l'un des constructeurs italiens les plus prestigieux dans la période d'après guerre et jusque dans les années 80. Crée en 1937 par Alfonso Morini, la marque s'illustra autant en compétition (en raflant quelques titres mondiaux ou en lançant le célèbre Agostini) que dans les rues avec quelques grands succès commerciaux. Face à la crise des années 80, la firme est cédée en 1987 au groupe Cagiva-Ducati. La marque frôle même la faillite en 1995 quand le groupe Cagiva-Ducati passe sous le giron d'un fond de pension Américain. Comble de l'histoire, c'est le neveu de son créateur, un certain Franco Morini, qui créa entre-temps la célèbre fabrique de moteur du même nom, qui rachète la marque en 1999. Après dix années de labeur, les deux entités (la fabrique de moteur et la marque Moto Morini) sont désormais entièrement repassées sous le giron familial. Bref, voilà un destin assez peu courant dans le monde industriel actuel pour qu'il mérite d'être souligné.

Trail à l'italienne
La Granpasso s'attaque au segment des gros trails-routiers avec un style original, caractérisée par sa face avant torturée, percée de deux feux lenticulaires. S'il est vrai que les goûts et les couleurs ne se discutent pas, la Corsaro ou la 9 1/2 semblaient un peu plus consensuelles. Quoi qu'il en soit, la conception de la Granpasso reste très élaborée. Comme sur ses soeurs, on retrouve un cadre treillis tubulaire en acier et le bicylindre en V de 1187 cm3 commun à la gamme. Mais ce qui impressionne, c'est surtout la qualité des éléments périphériques : amortisseurs Ölhins à bombonne séparée entièrement réglable, bras oscillant en alu, fourche inversée Marzocchi de 50 mm, jantes à rayons Excel, freinage Brembo avec maître-cylindre radial pour les leviers... Bref, que du beau matos qui témoigne du positionnement plutôt sportif de la Granpasso. Côté finition, le bilan est un peu plus mitigé. Le revêtement de selle antidérapant surpiqué ou les écopes latérales intégrant les clignotants font bonne impression. On relève tout de même quelques détails fâcheux comme les nombreux câbles apparents autour du guidon ou le système de fixation du pare-brise un peu branlant. L'instrumentation s'avère fournie et pratique. L'affichage du compteur se commande au guidon. Le bloc compteur entièrement digital offre l'essentiel (trip partiel, température moteur, heure, voyant de pression d'huile, tension de batterie et même un chrono). On regrette tout juste que le voyant de passage en réserve n'ait pas cédé sa place à une vraie jauge à essence et que le compte-tour digital à segment ne soit pas plus lisible. Les feux de détresse ou le pré-câblage pour les poignées chauffantes ou les feux additionnels complètent le tableau avec le sabot moteur ou les larges poignées de maintien passager.

Folie des grandeurs
Premier constat une fois selle, la Granpasso se destine avant tout au grand gabarit. Avec une hauteur de selle de 875 mm, les pilotes de moins d'1,80 m auront bien du mal à poser les deux pieds au sol à l'arrêt. Conscients du problème, les responsables de la marque proposent une selle creusée en option, qui peut également remplacer la selle d'origine à l'achat. La position de conduite s'avère malgré tout assez agréable. La forme creusée de l'assise permet au pilote de bien se caler tandis que l'entrejambe affiné laisse une totale liberté de mouvement. Le guidon est très large et un peu éloigné, ce qui oblige tout de même à basculer légèrement le buste vers l'avant. Une fois lancée, la Granpasso se révèle d'une maniabilité remarquable. La bonne répartition des masses et le diamètre de braquage court permettent ainsi un guidage très instinctif dès les premiers tours de roues. Ajoutons qu'il est facile d'adapter la granpasso à la morphologie de chacun. L'inclinaison du pare-brise est réglable, faisant ainsi évoluer sa hauteur. Les feux peuvent également être ajustés très simplement, tout comme l'écartement des leviers.

Coeur de lion
De sa mise en route, le bicylindre en V refroidi par eau donne le ton. Avec une sonorité détonante à peine étouffée et une très faible inertie, ce bloc moteur vous plonge dans une ambiance très sport. Comme la plupart des italiennes, il convient tout de même de laisser la bête monter en température pour éviter les trous à froid (et ce malgré l'injection...). Ensuite, le bicylindre délivre son couple dès 2500 tr/min et répond instantanément dès les plus bas régimes, à tel point qu'on se croirait presque aux commandes d'un monocylindre. Sa relative souplesse permet en plus de reprendre à 2000 tr/min sans trop d'à-coup, si bien que la Granpasso offre un mélange de douceur et de réactivité délectable. On se prend vite à descendre deux ou trois rapports en entrée de virage, profitant de l'efficacité de l'anti-drible et d'enivrantes détonations, avant d'exploiter cette force de traction en enchaînant promptement les rapports en sortie de courbe. Seul bémol, la boîte de vitesse à 6 rapports se montre un peu ferme et pas toujours très précise. Mieux vaut donc bien verrouiller les rapports et anticiper pour trouver le point mort avant de s'arrêter. Les purs citadins seront également surpris par l'étagement de boîte. La première semble ainsi très longue, si bien que la synchronisation première/seconde n'est toujours très naturelle lorsqu'on évolue au ralenti. Sur des terrains plus dégagés, le bicylindre révèle un tempérament tout aussi aguicheur sur la seconde moitié du compte-tour. L'accélération est ininterrompue jusqu'au rupteur aux environs de 8500 tr/mn. Autant dire qu'on frôle vite le déraisonnable sur voie rapide (+ de 230 km/h en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire). Précisons tout de même que nous disposions ici d'une version italienne en full power (118 ch), ce qui aide aussi... Il n'en reste pas moins que ce bloc moteur est une agréable surprise. Il se montre particulièrement plaisant dans tous les registres et offre surtout son lot de sensations pour une consommation raisonnable pour la cylindrée, environ 9,5 l /100 km.

Plus sportives que routières
Ces sensations sont d'autant plus appréciées que la partie-cycle semble en parfaite adéquation avec les qualités du twin. Très vive grâce à ses roues de 17 et 19 pouces chaussées de pneus fins (150 mm à l'arrière), la Granpasso se balance d'un virage à l'autre avec une aisance déconcertante et fait vite oublier ses 210 kg à sec. Une fois inscrite en courbe, son cadre rigide à souhait et ses suspensions remarquables font le reste pour une tenue de route très efficace. Les seules limites sont atteintes bien au-delà des vitesses autorisées sur voies rapides, où le train avant semble un peu baladeur, phénomène fréquent sur ce type de moto et avec de tels pneumatiques. Le freinage se montre globalement à la hauteur. À l'avant, l'attaque est sage (ce qui est plutôt une qualité en cette saison hivernale et en l'absence d'ABS) et la puissance est largement au rendez-vous lorsqu'on tire franchement sur le levier. L'arrière est également très progressif pour éviter les blocages intempestifs. En utilisation routière, il faut reconnaître que la Granpasso se montre un peu moins confortable que certaines concurrentes digne de GT (BMW R 1200 GS, Honda Varadero...). Les suspensions s'avèrent un peu fermes à la longue, tout comme la selle. En outre, on perçoit également quelques vibrations dans les repose-pieds à vive allure. Enfin, si la protection est correcte pour le haut du corps (à condition de bien régler le pare-brise), les pieds et les mains restent assez exposés. En revanche, on apprécie l'autonomie royale (environ 280 km) et le confort acceptable pour le passager. Quant au off-road, inutile de préciser que la Granpasso ne s'y aventurera que très occasionnellement, comme bon nombre de trails-routiers d'ailleurs.

Bilan essai Moto-Morini Granpasso
Bilan essai Moto-Morini Granpasso

Bilan essai Moto-Morini Granpasso

La Moto Morini Granpasso se présente comme une des rares motos de caractère sur segment des gros trails-routiers d'ordinaire réservé à des montures plus polyvalentes et moins radicales. Certains lui reprocheront certainement son extrémisme, notamment en termes de confort et d'aspects pratiques ou d'entretien (transmission par chaîne). Il n'en reste pas moins que l'italienne sort du lot par son efficacité, et surtout par les sensations de conduite qu'elle distille. Or, l'histoire a démontré que sortir des sentiers battus peut parfois se révéler payant, à l'image du relatif succès de la KTM 990 Adventure ou de la Triumph 1050 Tiger. Affichée à 12990 €, La Moto Morini y ajoute un tarif acceptable pour la catégorie, d'autant que la garantie constructeur est portée à trois ans (kilométrage illimité) pour rouler l'esprit tranquille.

On aime bien

  • Réactivité moteur
  • Vivacité
  • Garantie 3 ans

On aime moins

  • Hauteur de selle
  • Précision de la boîte
  • Assise ferme

Notre avis

Quotidien⭐⭐⭐
Voyage⭐⭐⭐
Loisir⭐⭐⭐⭐
Sport⭐⭐⭐
Duo⭐⭐⭐
On vous regarde⭐⭐⭐
On la détaille
On l'écoute⭐⭐⭐⭐

Photos essai Moto-Morini Granpasso

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Fiche technique Moto-Morini Granpasso

Tarif (janvier 2009)12 990 €
Puissance118ch à 8500 tr/min
Couple10,6mkg à 7000 tr/min
Frein AV2 disques 298 mm, étriers double pistons
Frein AR1 disques 255 mm, étriers double pistons
Hauteur de selle875 mm
Poids (constructeur)210 kg à sec
Réservoir/Conso27 L / 9,5 L aux 100km
Diamètre de braquage5 440 mm
Kilométrage au départ6000 km
Conditions météos pluie nuages (5°C)

Données techniques et tarifs peuvent changer sans préavis. Vous trouverez des informations complémentaires ainsi que le dernier tarif sur le site officiel.

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